Reportage

Immersion dans les secrets de fabrication du Toyota Yaris Cross

Immersion dans les secrets de fabrication du Toyota Yaris Cross

Comptant encore 900 000 m2 de disponibles, le site TMMF d’Onnaing a la possibilité de s’agrandir.

© Samuel Dhote

Seul site de production du constructeur japonais dans l’Hexagone sur les 68 usines qu’il compte dans le monde, la TMMF (Toyota Motor Manufacturing France) d’Onnaing se concentre essentiellement sur le modèle de citadine Yaris et sa déclinaison SUV Yaris Cross. Ainsi, sur le principe de « produire là où se trouve le marché », 1 Toyota sur 4 vendues en Europe sort des lignes de cette usine que nous avons eu le privilège de visiter.

Implantée dans le Nord de la France (près de Valenciennes, dans le département des Hauts-de-France) en raison de sa proximité avec le siège européen de Toyota à Bruxelles, mais aussi de l’historique savoir-faire de la région en matière d’industrie, la Toyota Motor Manufacturing France d’Onnaing a débuté son activité en 2001 avec le lancement de la Toyota Yaris de première génération.

toyota usine haut

Le site TMMF d’Onnaing est 30% plus compact que ceux de la concurrence. Un espace restreint qui ne sacrifie en rien son efficacité industrielle. Crédit : Samuel Dhote

À l’époque, environ 2 000 personnes y travaillaient. Aujourd’hui, l’usine Toyota d’Onnaing s’inscrit comme le premier site de production automobile en France, devant les structures de Stellantis à Sochaux et Mulhouse grâce à une capacité de 300 000 véhicules fabriqués par an, et emploie 5 000 technicien(ne)s expérimenté(e)s (dont 79% d’hommes et 21% de femmes).

femme technique

Crédit : Clotilde Gaillard

Avec les entités présentes sur la zone d’activité – le fournisseur de pièces de carrosserie Toyotomi, le spécialiste de l’injection plastique Boshoku ou encore la société de services Tsusho –, cet effectif est même porté à 6 000 agent(e)s.

Un site d’ampleur mais compact

Avant d’enregistrer un record de production en 2023, le site a connu bien des évolutions depuis plus de deux décennies. Initialement érigé avec une capacité de production de 150 000 unités, l’usine a dû s’étendre face au succès de la Yaris – qui, en mars 2023, a rejoint la Corolla, le RAV 4 ou la Camry au rang des véhicules écoulés à plus de 10 millions d’exemplaires dans le monde. Ainsi, depuis 2004, le processus de fabrication est passé au 24/24 et, à compter du mois d’avril 2024, l’usine abandonne le thermique pour ne se consacrer qu’aux motorisations 100% hybride.

toyota yaris assemble

Plutôt d’une alarme agressive, c’est une douce musique (à l’image de la bande originale du film Jeux Interdits) qui retentit pour prévenir de l’activation d’un bouton d’arrêt machine. Crédit : Samuel Dhote

Objet d’un milliard et demi d’euros d’investissements cumulés et matrice de 4,5 millions de véhicules en 23 ans d’existence, la Toyota Motor Manufacturing France d’Onnaing a été pensé avec une volonté d’optimisation, de ses activités comme de son espace. Établi sur un terrain restreint de 17 hectares, la TMMF a fait le pari payant de dimensionner l’usine d’Onnaing au marché en optant pour le choix pragmatique de rassembler tous les départements nécessaires au fonctionnement de la chaîne de valeurs (ateliers presses, carrosserie, peinture, plastique, etc.) au sein d’un seul et même lieu. Une promiscuité permettant une flexibilité et une rapidité, notamment en matière de contrôle qualité, celui-ci s’effectuant sur place. Mais aussi des économies de chauffage et de déplacement.

Pléthore de projets en lien avec la durabilité

Une compensation sur les coûts des énergies (plus abordable en France que dans d’autres pays) et le transport de pièces qui assure à la TMMF d’Onnaing de demeurer compétitive même avec une main d’œuvre tricolore globalement 20% plus onéreuse qu’ailleurs. Ce fonctionnement local et condensé avance également un autre avantage : celui de la durabilité. Moins de kilomètres parcourus c’est en effet moins d’émissions de carbone rejetées. Une dimension écologique – qui s’incarne également dans le traitement des eaux usés et l’installation d’un bassin de récupération d’eau de pluie sur le site – qui s’envisage aussi dans un éventuel passage à l’électrique de l’usine, dont la potentialité pourrait se concrétiser grâce aux multiples gigafactories qui essaiment sur le territoire français.

assemblage rouge

Crédit : Clotilde Gaillard

Parce qu’ « une entreprise doit avoir des projets car sans investissements, on ne progresse pas », comme le souligne Rodolphe Delaunay, Président directeur général de TMMF, le groupe vise la neutralité carbone en 2030 et celle de sa production en 2040. Pour atteindre ses objectifs, des ombrières photovoltaïques seront bientôt déployées sur le parking du site d’Onnaing tandis qu’une installation géothermique et des pompes alimentées par des panneaux solaires sont également prévus.

Une fourmilière à l’organisation nipponne où chaque mètre carré est optimisé

Équipés d’un casque et de chaussures professionnelles, nous déambulons dans cette ruche bourdonnante où le volume sonore est tel que les salles de repos se doivent d’être installés dans des préfabriqués en hauteur. Dans ce lieu « où la créativité latine s’allie à la rigueur japonaise, ce qui fait notre compétitivité » selon les termes poétiques de Rodolphe Delaunay, la culture du pays du Soleil Levant se retrouve partout, notamment dans le vocabulaire technique des espaces baptisés Dojo, Kaisen, etc.

dojo presse

Crédit : Clotilde Gaillard

La visite s’entame par les lignes de presses, pourvues de six machines lourdes. Ici, des bobines pesant entre 10 et 20 tonnes passent dans des lignes de découpe où l’acier se trouve lissé et huilé avant d’être débité. La feuille d’acier (ou « flanc ») ainsi obtenue subit ensuite une opération de moulage et de poinçonnage avant d’être transférée à l’atelier de contrôle qualité (par échantillonnage et paluchage) suivant à l’aide d’un bras ventouse évitant d’abimer la pièce lors d’un déplacement. Il faut dire qu’il suffirait d’un cheveu pour créer un défaut !

presse zoom

Crédit : Clotilde Gaillard

Une fois vérifiée, la centaine de pièces produites en « juste à temps » (c’est-à-dire avec zéro stock) poursuit son parcours en étant palettisée et envoyée vers l’atelier carrosserie. Divisé en en plusieurs secteurs (zone caisse, capot, portière...), cet espace compte 600 robots et convoyeurs aériens principalement utilisés pour l’assemblage des petites pièces afin d’assurer la géométrie de la structure. Pour cause : une voiture dénombre pas moins de 3 800 points de soudure : un véritable travail de précision !

toyota stock

Quotidiennement, ce sont 3,8 millions de pièces qui circulent sur le site TMMF d’Onnaing. Crédit : Samuel Dhote

Vient à présent l’étape de la peinture au sein d’un atelier très aseptisé et visible depuis un tunnel de plexiglas. Cette opération marque l’étape la plus longue du processus, prenant la moitié du temps de production soit environ 7 à 15 heures en tout. D’abord, il y a la phase de nettoyage (ou phosphatation), traitement de surface en plusieurs bains servant à débarrasser le véhicule de l’huile qui recouvrait ses pièces. Puis, c’est au tour de la cataphorèse, ou application anticorrosion devant protéger jusqu’aux corps creux, de la pose de joints d’étanchéité, de tapis d’insonorisation, de cordons de mastique et enfin de peinture en trois couches par cartouche, procédé permettant d’économiser de la matière et de l’eau puisqu’il n’y a qu’à rincer la buse d’application pour changer de couleur.

peinture © Samuel Dhote

Entre autres spécificités, le site TMMF d’Onnaing possède son propre atelier de plasturgie – où est notamment conçue la planche de bord –, étalé sur 40.000 m². Crédit : Samuel Dhote

Coquille vide mais teinte, la voiture arrive ensuite à l’atelier d’assemblage pour bénéficier de l’intégration de composants comme le ciel de toit, la batterie, le système de freinage, le châssis, les roues, les sièges, etc. À cet endroit, on voit s’activer de petits chariots autonomes, suivant consciencieusement une bande magnétique et transportant les lourds moteurs qui seront ensuite embarqué dans les voitures. Un ballet chorégraphié, voire millimétré, entre l’humain et la machine qui permet de produire un véhicule toutes les 58 secondes (soit 1 250 par jour).

robot autonome

Crédit : Clotilde Gaillard

La course de la Toyota Yaris (ou du Yaris Cross) ainsi fabriqué se termine dans le tunnel d’inspection lumineux pour un contrôle qualité final. Ainsi, 2 500 points de surveillance sont vérifiés afin de détecter d’éventuels dommages comme des rayures. L’étanchéité du véhicule est aussi testée après une douche avant de subir un examen dynamique de comportement routier sur l’une des deux pistes d’essai.

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Crédit : Clotilde Gaillard

Généralement, 90% des véhicules sont jugés conformes aux exigences du constructeur aux termes de ce passage en revue, un ratio plus que raisonnable.

Une extension programmée pour s’adapter aux évolutions du marché

Comptant encore 900.000 m2 de disponibles, le site TMMF d’Onnaing « a encore la possibilité de s’agrandir » admet Rodolphe Delaunay, ceci en vue d’accompagner la flexibilité de l’usine. « Il y a une menace chinoise réelle sur l’électrique car les constructeurs en maîtrisent toute la chaîne de valeurs, des processeurs aux batteries. Cela nous amène ainsi à nous remettre en question et à ne pas faire le pari d’une seule technologie », complète le vice-président manufacturing de TMMF. Si l’hydrogène « pourrait être envisagée sur notre réserve foncière mais doit d’abord être exploitée », c’est en premier lieu vers l’électrique que le pionnier de l’hybride Toyota entend orienter ses activités avec une plateforme « multipass way techno » incluant toutes les motorisations.

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Rodolphe Delaunay, Président directeur général de TMMF. Crédit : Samuel Dhote

Notant parmi ses principales priorités la réduction des émissions de CO2 et la durabilité des lieux ainsi que le maintien des 5 000 emplois directs (et 10 000 indirects), Rodolphe Delaunay reconnaît que « l’industrie tend à se complexifier, en témoigne la prise en considération croissante de l’intelligence artificielle» Déjà expérimenté sur le site TMMF d’Onnaing avec l’utilisation d’un masque à réalité virtuelle pour former les membres oeuvrant sur l’atelier peinture notamment, « l’IA va aussi aider à améliorer l’ergonomie des postes de travail », prédit Rodolphe Delaunay. Qui en est convaincu : « Le marché de demain se trouve plus à l’Ouest qu’à l’Est. »

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Crédit : Clotilde Gaillard

Yaris Cross BI 2024 © Toyota Samuel Dhote 1455884

Crédit : Samuel Dhote

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